Je viens de terminer le livre « Born a crime » de Trevor Noah. Je suis passée du rire aux larmes à une réflexion sur l’invalidation de nos histoires.
Atteindre la trentaine, devenir mère et quitter l’Afrique pour L’Amérique du Nord m’ont donné encore plus envie de m’éduquer, d’apprendre, de me documenter et de me remettre en question. Changer de continent met face à des problématiques que je voyais de loin. Dans toutes ces informations à consommer + nouvelles expériences à vivre, j’ai toujours pensé qu’il ne fallait pas nier les émotions des uns et des autres. J’ai toujours pensé qu’il fallait donner la parole à chacun et laisser la place au débat même quand ça devient « messy ».
Le malaise en réalité s’installe quand on pense que telle ou telle histoire ne vaux pas la peine d’être racontée selon nos critères.
J’ai évolué dans des environnements où j’ai parfois entendu : pourquoi tu veux parler de ça? est ce que c’est si important? Tu exagères, tu es trop sensible, ce que tu lis là t’apportes même quoi? Quel livre change la vie d’une personne ? A quoi ça sert de raconter cette histoire? Tout le monde passe par là, ça n’a rien d’exceptionnel. Pourquoi tu as besoin de réponses à ces questions? C’est bon passe à autre chose tu es déjà une adulte. Pourquoi tu postes ça sur les réseaux sociaux ? ça t’apportes quoi ? Les gens vont penser que… SILENCE SILENCE !!!!
Invalidation sur invalidation sur invalidation.
Et puis j’ai commencé à préciser mes lectures, à assainir mes timelines sur les réseaux sociaux. Pas de place pour ceux qui invalident les vécus des autres, pour ceux qui disent aux autres de taire leur histoire car ça leur permettrait à eux de se sentir mieux.
Dans ce livre j’ai encore eu la confirmation que se mettre à la place des autres était capital pour mieux comprendre chaque société et son histoire.
Trevor Noah a expliqué comment entre autres parler différentes langues l’a rapproché des différentes groupes ethniques de son pays, comment avec le recul et ce que sa mère a pu vivre il a vu les violences conjugales sous un autre prisme, comment la ferveur religieuse de sa mère était incompréhensible et fascinante, comment la notion de criminalité n’était pas si évidente, comment c’était de vivre dans sa peau (littéralement) etc… Autant de thèmes abordés qui avec son vécu ont une autre dimension. Même si ces sujets ont déjà été évoqués ailleurs, chaque histoire apporte une nouvelle perspective. Avant de lire ce livre je pensais connaitre suffisamment l’histoire de l’Afrique du Sud et bien non.
Et quand les choix de vie et les circonstances ne nous sont pas familières qu’est ce qu’on fait ? On se tait et on va se documenter. Quand on est pas une femme, on est mal placé pour parler des sujets qui impactent directement les femmes. Quand on est pas issu des « minorités visibles », on est mal placé pour parler des discriminations liés à la couleur de peau et du racisme parce que cela ne nous touche simplement pas. La liste est longue.
Laissons les personnes concernées directement par les situations s’exprimer, apprenons de leurs histoires, ne supprimons pas leur voix. Cela ne nous empêche pas de participer à la conversation mais dans un rôle d’apprenant plutôt que de donneur de leçons.
A celles et ceux qui veulent raconter leur histoire comme moi, armons nous de courage, faisons entendre nos voix sans invalider celle des autres. Il ya de la place pour toutes les narrations et peut être, peut être que nos vécus seront des miroirs, des remèdes pour les autres.
Playlist
Sho Madjozi – John Cena
Mafikizolo feat Uhura – Khona
Kevin O Chris – Seja Bem Vinda
Lizzo – Truth Hurts
Youssoupha – Entourage